La streptococcie chez le porc est une maladie causée par une bactérie Streptococcus suis (S. suis). S. suis peut infecter des espèces autres que le porc, par exemple les ruminants, les oiseaux mais aussi l’espère humaine : il s’agit d’une bactérie zoonotique.
Streptococcus suis agent responsable de la streptococcie chez le porc
Une classification, basée sur les caractéristiques antigéniques de la capsule polysaccharidique qui entoure cette bactérie permet de distinguer différentes sous-populations appelées « sérotypes ». Vingt-neuf sérotypes sont décrits aujourd’hui.
Toutes les souches de S. suis ne sont pas pathogènes. Certains sérotypes sont cependant plus fréquemment retrouvés en cas de maladie. En France on retrouve les sérotypes 2, 9, 7, 1 (données Biovac).
Illustration : photo de S. suis vu au microscope électronique (Meijerink et al. 2012)
La transmission de la bactérie peut se faire :
- de la truie au porcelet : c’est la voie verticale,
- et/ou entre porcelets : c’est la voie horizontale.
La contamination verticale peut intervenir très tôt, dès la naissance, lors de l’expulsion si S. suis est présent au niveau du vagin de la truie. La contamination horizontale se produit par contact direct, nez à nez, entre un animal infecté et un animal sensible (porcelet au contact de sa mère). Une infection par voie aérienne a aussi été décrite. Les insectes comme les mouches peuvent être vecteurs de S. suis.
Les porcs contaminés ne tombent pas forcément tous malades, cependant, ils resteront porteurs et S. suis sera hébergé au niveau des voies respiratoires supérieures (cavités nasales, pharynx), des amygdales, des fluides oraux et du tube digestif. Et pour certains porcs, S. suis parvient à gagner la circulation sanguine où il peut survivre. Il est ainsi disséminé dans toutes les régions de l’organisme où il va pouvoir entraîner des lésions inflammatoires. S suis possède la capacité de passer la barrière méningée réputée pourtant très imperméable (Segura et al 2016).
La survie de S. suis dans le milieu extérieur est possible. Elle va de quelques heures à quelques jours en fonction de la température et du support sur lequel la bactérie se trouve. A température ambiante, S. suis peut rester viable 8 jours s’il se trouve au sein de matières fécales. Dans de la poussière sont espérance de vie ne dépasse pas 24h.
Quels sont les facteurs de risque ?
L’apparition pour la première fois de signes cliniques de streptococcie dans un élevage fait suite soit à l’introduction d’une nouvelle souche (défaut de biosécurité externe), soit à la présence de facteurs favorisants qui permettent à une souche historiquement présente de se manifester.
Parmi les facteurs favorisants nous pouvons citer (Tocqueville et al 2013, Remond 2020) :
- une conduite d’élevage non rigoureuse : mélange de bandes, mélange de portées/case, surdensité,
- une mauvaise gestion des ambiances : sous ventilation, écarts thermiques,
- la présence de co-infections surtout virales : grippe, SDRP,
- des diarrhées colibacillaires en post-sevrage pourrait également favoriser l’expression de streptococcie
Quels sont les signes cliniques ?
Les animaux qui présentent des signes cliniques sont principalement les porcelets entre la naissance et l’entrée en engraissement. En effet, on observe une diminution de la sensibilité à l’infection avec l’âge.
Le tableau clinique et lésionnel est multiple : il se caractérise par des mortalités brutales, des méningites, des troubles locomoteurs, des arthrites, des pleurésies, des péricardites, des péritonites, des endocardites…qui affectent les porcelets entre la naissance et le début d’engraissement.
Dans certaines situations, la morbidité (proportion de porcelets atteints) peut atteindre les 50% et la mortalité en cas d’absence de prise en charge les 20% (Dutkiewicz et al. 2017). Il est rare de voir de la clinique épidémique survenir en engraissement.
Comment diagnostiquer la streptococcie ?
Le diagnostic de la streptococcie doit associer une expertise clinique (Cf. signes cliniques) à un isolement bactérien. Cet isolement bactérien doit être réalisé sur des porcs présentant ou ayant présenté une clinique représentative et non traités aux antibiotiques. Les prélèvements doivent être réalisés à partir de sites lésionnels de référence : système nerveux central, articulation, foie, rein, rate, cœur (et surtout pas les poumons ou les cavités nasales).
Un guide retraçant les étapes des prélèvements en élevage a été rédigé par Ceva Biovac en collaboration avec Labofarm. (Cf. Streptococcie : Les bonnes pratiques dans le cadre de prélèvements en élevage).
La culture bactérienne effectuée au laboratoire doit montrer la présence de S. suis. Il est à noter que, contrairement à de nombreux autres agents infectieux, il n’existe pas à ce jour de test disponible pour suivre l’infection à S suis à partir de prises de sang.
A noter qu’à partir des cas de mortalités aiguës ou de troubles locomoteurs évoquant une méningite en post-sevrage, il est difficile de faire la différence avec la maladie de l’œdème sans avoir recours aux analyses de laboratoire.
Comment prévenir la streptococcie ?
La prévention de la streptococcie passe tout d’abord par le respect des règles de biosécurité externe : éviter qu’une nouvelle souche pathogène ne pénètre dans l’élevage. Même s’il est vrai que l’infection par voie aérienne est possible, la voie de contamination la plus importante reste l’introduction de souches via ce que l’on appelle des « vecteurs animés » : animaux, visiteurs.
Le passage en revue et la correction des facteurs de risques énumérés dans un chapitre vu précédemment doivent être réalisés. Si malgré tout, la situation n’est pas maitrisée, le recours à la vaccination est possible. Celle-ci se faisant dans des conditions particulières, il est indispensable de discuter de la démarche à suivre avec son vétérinaire.
Quelles sont les conséquences techniques et économiques de la streptococcie ?
Une des manières d’objectiver l’impact de la streptococcie dans des élevages affectés est d’effectuer une comparaison technico-économique avant et après prise en charge de cette pathologie. Une étude publiée lors du Congrès AFMVP de 2016 présentait les résultats obtenus dans 7 élevages « naisseur-engraisseur » après la mise en place de mesures de contrôle. Les critères d’évaluation retenus étaient le taux de pertes en post-sevrage et le coût des traitements antibiotiques du sevrage à l’abattage.
Au bilan, en moyenne sur les 7 élevages, le taux de pertes en post-sevrage est passé de 4,53% à 2,25% (soit 1,83 € / 100 kg de carcasse) et le coût des traitements antibiotiques a diminué de 0,53 € / 100 kg de carcasse. Soit un gain de 2,36 € / 100 kg de carcasse.
Références bibliographiques
- Goyette-Desjardins, Guillaume, Jean Philippe Auger, Jianguo Xu, Mariela Segura, and Marcelo Gottschalk. 2014. “Streptococcus Suis, an Important Pig Pathogen and Emerging Zoonotic Agent-an Update on the Worldwide Distribution Based on Serotyping and Sequence Typing.” Emerging Microbes and Infections 3 (June). https://doi.org/10.1038/emi.2014.45
- Warneboldt, Franziska, Saara J. Sander, Andreas Beineke, Peter Valentin-Weigand, Josef Kamphues, and Christoph Georg Baums. 2016. “Clearance of Streptococcus Suis in Stomach Contents of Differently Fed Growing Pigs.” Pathogens 5 (3). https://doi.org/10.3390/pathogens5030056.
- Tocqueville Véronique, Jouy Eric, Kempf Isabelle, Marois-Crehan Corinne. 2013 « Etat actuel des connaissances sur Streptococcus suis ». AFMVP
- Dutkiewicz, Jacek, Jacek Sroka, Violetta Zając, Bernard Wasiński, Ewa Cisak, Anna Sawczyn, Anna Kloc, and Angelina Wójcik-Fatla. 2017. “Streptococcus Suis: A Re-Emerging Pathogen Associated with Occupational Exposure to Pigs or Pork Products. Part I – Epidemiology.” Annals of Agricultural and Environmental Medicine 24 (4): 683–95. https://doi.org/10.26444/aaem/79813.
- Segura M, Calzas C, Grenier D, Gottschalk M. 2016. Initial steps of the pathogenesis of the infection caused by Streptococcus suis: fighting against nonspecific defenses. FEBS Lett. 590(21): 3772–3799.