Ceva Swine Health Blog

Un audit en 10 points pour mieux appréhender la mortinatalité

Rédigé par Nathalie Capdevielle | 7 oct. 2022 12:53:37

Pour beaucoup d’élevages la mortalité des porcelets avant sevrage est loin d’être une problématique négligeable. En effet, le taux actuel de mortalité avant sevrage est d’environ 20 % du nombre total de porcelets né vivants. Mais pour certains élevages ce taux peut être bien plus élevé.

Cette problématique est d’autant plus importante à contrôler que les lignées de truies sont désormais pour la plupart hyperprolifiques. Ainsi la taille des portées et le nombre de porcelets nés ne cessent d’augmenter. Comment faire pour permettre à la majorité des porcelets de survivre dans ce contexte ?

 

Un audit centré sur les premiers jours de vie des porcelets

L’observation en élevage montre que la mortalité survient principalement dans les premiers jours de la vie. Ainsi plus de de 30% des pertes se produisent le premier jour de vie et environ 60% des pertes sur nés vifs ont lieu sur la période couvrant le premier et le second jour de vie.

 

Illustration : répartition du nombre de porcelets morts en fonction de leur âge en jours (Launay 2018, Thèse Ceva Oniris).

Réduire cette mortalité précoce est donc un réel défi. Et pour cela, l’idée est de se concentrer sur des événements clés comme le déroulement de la mise-bas et l’absorption de colostrum par les porcelets.

L’audit va donc consister à mener une véritable enquête sur place et en temps réel sur les cas de mortalité des porcelets observés dans l’élevage à problème (Leneveu et al., ESPHM 2021.

La démarche va se découper en 3 temps :

  1. Examen et autopsie des porcelets morts par le vétérinaire à l’aide d’une méthode standardisée : permet de déterminer les principales causes de mortalité des porcelets dans l’élevage investigué,

  2. Collecte au fur et à mesure des résultats dans un bilan par l’éleveur : contribue à impliquer l’éleveur dans l’audit et dans l’observation de ce qui se passe dans son élevage, ceci dans un objectif pédagogique,

  3. Analyse des résultats et principales conclusions : permet de dégager les principales pistes d’actions pour améliorer la situation immédiatement avec l’éleveur et de le convaincre d’agir. 

Une analyse méthodique pour cerner les principales causes de mortalité

C’est la première étape de cet audit : elle est fondamentale car c’est celle qui va permettre ensuite de dégager les pistes de travail.

Les causes de mortalité néonatales sont multiples. Elles sont soit d’origine infectieuse (SDRP, PCV2, septicémie) ou d’origine non infectieuse (durée de mise bas trop longue, poids de naissance insuffisant, défaut d’accompagnement de la mise-bas, défaut de prise colostrale etc…). Si elles sont retenues, les hypothèses infectieuses nécessiteront des analyses complémentaires.

Aussi, le bilan de l’audit va se focaliser sur la résolution de problèmes de mortalité des porcelets en lien avec une origine non infectieuse pour lequel l’éleveur pourra rapidement mettre en place des actions correctives.

Pour cela, l'éleveur va collecter les porcelets morts dans les 48 premières heures de leur vie pour les soumettre au vétérinaire qui réalisera deux types d'évaluation :

  1. Un examen externe des porcelets morts
  2. Une autopsie méticuleuse

Un nombre représentatif de porcelets à examiner

Il n’y a pas de nombre prédéfini de porcelets morts à examiner. L’objectif est d’en observer le plus possible et au moins un pourcentage représentatif du nombre total de porcelets morts. Cela peut varier de 15 à 30 porcelets.

Le nombre d’animaux examinés dépend également de l’expérience du vétérinaire et de sa rapidité à réaliser des autopsies et aussi évidemment du temps que l’éleveur veut bien consacrer à l’audit. L’idée est de se fixer une durée d’une heure maximum pour cette étape.

 

Une évaluation en 10 points

L’étape d’examen des porcelets repose sur le passage en revue de 10 points au total :

  1. 5 critères reposant sur l’observation de l’aspect externe,
  2. 5 critères nécropsiques, c’est-à-dire liés à l’autopsie.

A. Les 5 critères externes :



Ce sont les suivants :

  1. L’aspect général des porcelets : couleur, odeur, lésions traumatiques visibles etc…,
  2. Le poids des porcelets et leur état d’entretien,
  3. La forme du crâne,
  4. Le diamètre et l’état de dessication du cordon ombilical,
  5. La présence ou l’absence d’un bourrelet sur les onglons.


Illustration : abaque pour évaluer la forme du crâne des porcelets et leurs anomalies (Sacy et al., 2010).

 

Illustration : abaque pour évaluer à partir de la forme des onglons si le porcelet s’est déplacé.

 

B. Les 5 critères nécropsiques :


L’autopsie va s’attacher à déterminer :

  1. la présence de liquide ou de fibrine dans l’abdomen ou le thorax : signe d’inflammation,
  2. le résultat d’un test de flottaison des poumons : indicateur du fait que le porcelet a pu avoir une première respiration ou non,
  3. la nature du contenu de l’estomac : liquide fœtal, méconium, présence de lait etc…

  4. la nature du contenu du côlon,

  5. les traces de soins aux porcelets : meulage des dents, coupe de la queue …

Un excellent outil pour améliorer l'efficacité du conseil en élevage

L’enjeu de cet audit est d’aider l’éleveur à mettre en place rapidement des actions correctrices et qu’il soit convaincu de l’origine des mortalités. Il est donc important qu’il participe un maximum à l’audit. C’est le but recherché dans les étapes 2 et 3 de l’audit (collecte des observations et discussion).

Ainsi pendant que le vétérinaire effectue l’examen et l’autopsie, il va être demandé à l’éleveur de consigner les critères observés sur une grille papier préétablie. Cela permet aussi à l’éleveur de constater en temps réel et de de visu certaines anomalies. Par exemple, montrer des tubes digestifs vides à un éleveur est beaucoup plus convaincant pour lui faire prendre conscience d’un manque de prise colostrale que tous les conseils théoriques.

Photo 2 : notation par l'éleveur des observations faites par le vétérinaire lors de l'examen externe et nécropsique des porcelets. 

 

Une fois les critères enregistrés, une synthèse est faite pour dégager des causes dominantes de mortalité et donc définir les premiers axes de travail potentiels.

Cet audit mortinatalité est un outil simple à mettre en œuvre et peu coûteux. S’il bénéficie de la pleine collaboration de personnes en charge des mises bas, éleveur ou salariés, il s’avère très pédagogique et permet de définir rapidement un premier plan d’action correctif. C’est un premier bilan rapide qui peut être réalisé en deux heures tout compris et peut-être approfondi ultérieurement dans un but d’amélioration continue.

Les équipes Ceva se tiennent à la disposition des vétérinaires et éleveurs qui souhaitent mettre en place cette démarche d’audit pour un accompagnement méthodologique.